
L'héritage caché
En collaboration avec ; Gabriela Avila.
Résumé ;
Caché des yeux des Ohne Magie (les humains normaux) vivent les sorciers. Certains de leur enfants naissent sans pouvoirs, intégrant la société humaine à l'âge adulte. Ces enfants sont appelées les Descendants.
Maximilien est l'un d'eux. Policier de métier, il est mandaté par sa famille d'enquêter sur une vague de disparitions de Descendants.
Gabriel est un Ohne Magie. Étudiant en médecine et athlète de surcroît, il a tout pour réussir. Son chemin croise celui de Maximilien par hasard un matin dans un café.
Une chose en amenant une autre, il se retrouve impliqué en plein kidnapping , plongeant tête première dans une enquête mêlant magie et amour.
Que lui cache Maximilien? Est-il vraiment ce qu'il croit être? Chose certaine, sa vie ne sera plus la même.
Lexique ;
Voici un lexique des termes employés durant notre histoire.
Descendant = Sorcier sans pouvoir.
Ohne Magie= Non sorcier A.K.A humains normaux
Les Élus = Le couple régnant sur les sorciers et les humains.
Genträger = Humain porteur de gène
Prologue.
Il était une fois...
Au temps où les chevaliers combattaient les uns contre les autres et où les châteaux ressemblaient à des forteresses, les sorciers se mêlaient aux humains sans jamais dévoiler leur véritable nature.
Un prince, Henri le combattant, ambitieux et déterminé s'apprêtait à accéder au trône de ses ancêtres. Avide de pouvoir, son peuple le craignait déjà.
Évelyne, issue de la noblesse et Descendante, était sur le point d'épouser l'homme de ses rêves. Guillaume était un Descendant d'une puissante famille de sorciers et un Duc respecté du royaume.
Le prince Henri le Combattant décida un jour d'augmenter les impôts dans son royaume pour financer la nouvelle croisade de son père. Le fiancé d'Évelyne, Guillaume, s'interposa sachant que ses paysans risquaient la famine, à cause des mauvaises récoltes et le départ des chefs de famille dans la guerre sainte. Le prince, ne supportant pas la moindre contradiction, déclara la guerre au fiancé, voulant tuer la rébellion dans l'œuf.
Le combat fut violent. Les forces d’Henry écrasérent celle de Guillaume aisément, les paysans de ce dernier ne faisant pas le poids contre les chevaliers du Prince. Les morts se comptèrent par milliers. Le dernier face-à-face a eu lieu, prince contre duc. L’épuisement eut raison de Guillaume, permettant à Henry de porter le coup fatal. Évelyne qui s'était déguisée en soldat pour pouvoir participer au combat, s'élança pour venger son aimé. À son grand désespoir, son attaque échoua. Le garde du corps du prince la désarma et la blessa, faisant couler son sang. Le prince la reconnut, et en s'approchant d'elle, étant encore blessé par son précédent corps à corps, il fit couler par mégarde des gouttes de son sang dans la blessure de celle-ci.
Une grosse explosion de magie se produit, s'échappant du corps d'Évelyne, assommant tout le monde sur le champ de bataille. Une fois le choc passé, Évelyne se réveilla et réalisa ce qui s'était produit. Elle et le prince étaient à présent les Élus, ceux qui étaient destinés à régner sur tous les humains et sorciers. Dotée de ses nouveaux pouvoirs, elle décida d'effacer la mémoire de tout le monde, se refusant de régner aux côtés de l'homme qui avait tué son amour.
Quelque temps après sa décision, de terribles événements survinrent dans tout le pays et les pays avoisinants, semant mort et dévastation. Les sorciers furent alors démasqués au reste de la population, le sort les cachant ayant éclaté en milles morceaux, déclenchant une énorme vague de chasse aux sorcières. Leurs pouvoirs exposés, ils devinrent les premiers suspects des catastrophes qui se produisaient. Malgré tout, Évelyne rejeta de toutes ses forces l'idée de prendre sa place au côté du prince. Ne voyant pas d'autres alternatives pour sauver les siens et pour permettre la reconstruction du sort, elle finit par mettre fin à ses jours afin de permettre l'avènement d'un nouveau couple Élu.
Chapitre 1
Le réveil retentit dans la chambre silencieuse de Maximilien. Il étira son bras basané en direction de sa table de nuit. Il tâtonna maladroitement jusqu’à que sa main tombe sur le bouton snooze de sa radio-réveil. C’était une antiquité mais son père la lui avait donné comme cadeau alors qu’il avait quitté le nid familial. En grognant, il se redressa dans son lit et ébouriffia ses courtes boucles noires. Il sortit péniblement de ses draps et grimaça lorsque ses pieds touchèrent le sol froid de sa chambre. Il jeta un coup d’oeil à son réveil qui affichait déjà 6h. Il se traîna vers les toilettes qui heureusement était en face de sa chambre et sauta dans la douche pour essayer de se réveiller.
En sortant de la salle de bain enroulé dans sa serviette, il longea le couloir vers la cuisine. Il appuya le bouton de la cafetière posée sur le comptoir, préparée la veille pour fournir le plus rapidement possible sa dose de caféine. Le temps d’enfiler son uniforme, sa première tasse de café de la journée était déjà prête. En fouillant dans son frigo, il trouva un plat en plastique qui n’était pas là la veille. En l’ouvrant, il fit tomber une note écrite à la main. Des muffins déjeuner… En lisant la note de sa mère, il réalisa qu’elle avait encore demandé à un des ses protégés animaliers de lui livrer de la nourriture. Il fixa son cellulaire bien tenté de texter sa mère pour lui demander d’arrêter une bonne fois pour toutes! En même temps, se dit-il en mangeant un des muffins, ça m’évite de devoir me faire à déjeuner…
La famille de Maximilien était particulière. Ils avaient tous un don ou une habileté que les non-initiés pourraient qualifier de pouvoir magique. Bien qu’il soit ce qu’on appelle un Descendant, donc un membre de la communauté magique qui ne manifeste pas de pouvoir, il savait que c’était plus complexe que ce que les livres fantastiques ou les films voulaient bien le décrire. En gros, sa mère pouvait communiquer avec les animaux et leur demander des faveurs. Il avait passé son enfance sous la supervision de souris, écureuils et oiseaux. « Et maintenant, ils remplissent mon frigo», songea-t-il amusé.
Il finit de manger sur la table dans sa cuisine, profitant du calme matinal. Après avoir avalé la dernière goutte de son café, il alla ramasser ses effets dans sa chambre. Il saisit au passage le dossier sur lequel il travaillait hier soir et le rangea dans le compartiment destiné à cet effet dans le bureau que son grand frère, Théodore, avait confectionné pour lui. Ce dernier était un forgeron qui créait des objets magiques. En appuyant sur le bouton en dessous de la table, tout ce qui se trouvait sur le dessus disparu comme si cela n’avait jamais existé. L’avantage des confections de son frère, était que même ceux qui n’avait pas de pouvoirs pouvaient en faire usage.
Il s’arma aussi d’une lame que Théo lui avait offert lors de son entrée dans les forces. Elle se portait dans un fourreau au poignet et était aussi longue que son avant-bras. Elle était enchantée de façon à ce que personne ne puisse la voir ni la sentir tant qu’elle ne sortait pas de son fourreau. Maximilien avait commencé à la porter quand les Descendants avaient commencé à disparaître un peu partout dans le monde. Cela rassurait sa famille et il se sentait moins exposé de cette manière. Alors qu’il sortait de son appartement, il entendit un klaxon. Il barra la porte et se tourna vers le son. Sa partenaire de travail l’attendait comme d’habitude. Il se précipita vers elle et embarqua dans la voiture, prêt à commencer sa journée en tant qu’agent de la police de Montréal.
***
Gabriel Bilodeau sortit de chez lui en courant. Il était en retard pour son entraînement de natation, comme d'habitude, et la conséquence prévue pour les retardataires lui faisait peu envie. Selon ses calculs, tenant en compte que l'entraîneur leur faisait nager dix longueurs à chaque retard, il devrait en faire 40 de plus à la fin de l'entraînement commun cette fois-ci. Gabriel se dépêchait pour se rendre à la piscine de l'Université de Mcgill, où il finissait la dernière année de son BAC en Médecine. Si tout allait bien, l'année prochaine, il commencerait sa spécialisation en Microbiologie et immunologie.
Une voix électronique retentit: «Your friend is attempting to reach you on your cellphone device». Il ne put s’empêcher de grogner car il savait exactement qui le textait. Il avait assignée cette notification à son meilleur ami, Tommy. «C’est mieux d’être urgent», songea-t-il en s’arrêtant. Il sortit frénétiquement son cellulaire de la poche de son manteau pour consulter le message s’affichant sur l'écran de son téléphone.«Grouille ton cul ! Pis oublie pas nos cafés l'intello!». Gabriel jura en passant rageusement sa main dans ses cheveux auburn. Il avait complètement oublié que c'était à son tour d'apporter les cafés pour la réunion qui avait lieu avant l'entraînement. Il soupira avant de faire demi-tour et entrer dans le premier café qu'il vit, qui se trouvait à être celui qu'il fréquentait assidûment.
Malheureusement pour lui, le café était bondé de monde. Normal pour un jour de semaine à 8h du matin se dit-il intérieurement. Du haut de son 1m80, il pouvait voir que la file devant le comptoir s'étirait dans toute la boutique. Il hésita un instant, puis la pensée des 40 longueurs de plus força sa décision. En s'excusant, il dépassa tout le monde, ignorant les plaintes et les cris de rage des autres clients. En affichant son plus beau sourire, sachant pertinemment que cela mettait en valeur ses tâches de rousseur sur son teint pâle, il s'adressa à la commis derrière le comptoir:
-Salut Sasha, j'vais prendre la même chose que d'habitude ma belle, lui dit Gabriel avec un clin d'oeil.
La commis, sous le charme du nageur musclé aux yeux verts, ne put s'empêcher de glousser avant de se précipiter pour préparer sa commande. Il faut dire que sa mâchoire carré et son petit nez fin lui donnait une allure très masculine et fière. Peu de personnes pouvaient rester indifférentes face à ses capacités de séduction, il le savait et en faisait allègrement usage.
Juste derrière lui se tenait Maximilien, et sa collègue, Amanda, qui attendaient depuis déjà 20 minutes pour passer leur commande. Le policier, musclé et mince, racla sa gorge afin d'attirer l'attention de Gabriel. Ce dernier se retourna, et le coude sur le comptoir, analysa Max de la tête aux pieds, s'attardant quelques instant sur ses yeux bleus et notant que l'officier était légèrement plus petit que lui. Avec son sourire ravageur, il s'adressa au policier comme si de rien n'était :
-J'peux vous aider monsieur l’agent ?
Maximilien ouvrit la bouche afin d'exprimer son mécontentement, mais aucun mot ne sortit, bouche-bée devant le beau jeune homme qui se trouvait devant lui. Il faut dire que Gabriel était exactement le type d'homme qui faisait craquer Max. Voyant qu'il s'était figé, sa coéquipière, Amanda, lui donna un coup de coude dans les côtes. Ce coup fit sursauter le policier qui passa nerveusement sa main dans ses boucles. Au passage, Gabriel ne manqua pas de remarquer la main puissante de Max. C’était vraiment quelque chose qu’il aimait chez ses partenaires masculins.
-S'cusez-moi, mais vous nous avez dépassé, dit-il en gardant son calme, l'uniforme lui rappelant qu'il ne pouvait pas s'emporter comme tous les autres derrière lui.
-Ah bon ? Lui répondit le jeune homme un sourire narquois au visage avant de se retourner pour pouvoir payer sa commande à la commis.
Voyant que l'intervention de Maximilien ne donnait rien, Amanda s'avança énergétiquement, mettant de l'avant sa stature athlétique. Elle lui dit sur un ton sec, les mains sur sa ceinture:
-Ce que mon collègue essaye de dire, c'est que vous avez dépassé tous ses gens ! Vous devriez faire la file comme tout le monde.
C'est à ce moment que la commande de Gabriel arriva. Il saisit le plateau que lui tendait la commis et avec un large sourire effronté, dont lui seul avait le secret, il lui répondit :
-Merci du conseil, j'en prends note pour la prochaine fois.
Et il quitta le café, sans un regard pour la policière qui affichait un air outré. Il y eut un moment de silence, puis Max fut le premier à parler.
-Je pense que j'suis en amour, lâcha Maximilien en rigolant.
-T'es vraiment un gros con ! Ne put s'empêcher de lui répondre sa coéquipière, exaspérée, avant de s'approcher du comptoir pour finalement commander son café matinal. Pourquoi t'es toujours attiré par les gars les plus arrogants que j'ai jamais connu?
-Ben là, quand même, mon dernier copain...
Maximilien s'interrompit brusquement en voyant le regard que lui jeta Amanda.
-Ok, t'as raison. La plupart de mes exs étaient vaniteux et arrogants, lui accorda-t-il en soupirant.
Satisfaite, Amanda hocha la tête avant de prendre une gorgée de son café enfin servi, balançant sa longue queue de cheval jais derrière son épaule.
-Le prix de mes sages conseils sera ce café, ok?
Max éclata de rire et paya sans se plaindre. Après tout, Amanda avait dû endurer plus d'une fois le récit de ses amours.
Chapitre 2
Maximilien venait de terminer sa longue journée de travail. Accompagné d’Amanda, il se dirigea vers la voiture de cette dernière. Depuis le temps qu’ils travaillaient ensemble, déjà 3 ans, Amanda le connaissait presqu’aussi bien que sa famille et vice-versa. Quoique la partie magie, il la tenait soigneusement dissimulée aux yeux de tous. Sa communauté magique ne pouvait se permettre d’être dévoilée au grand jour. La chasse aux sorcières des siècles précédents n’était pas très loin dans la mémoire collective.
Amanda ouvra la portière côté conducteur puis s’installa confortablement avant de jeter un coup d'oeil à Max et lui demanda :
-T’as besoin de faire un détour avant que je te ramène chez toi?
-Non, pas besoin merci, lui répondit-il en souriant avant d’attacher sa ceinture.
Max et Amanda étaient mort de fatigue et donc le trajet se fit dans le silence. Mais ma journée n’est pas encore finie, songea-t-il découragé. Il planifiait manger quelque chose et se plonger dans ses dossiers. Il s’était engagé auprès des dirigeants de sa communauté de sorciers, le Conseil, d’enquêter sur la vague de disparitions qui touchait les Descendants. Il avait vu passer quelques signalements de disparitions dans son commissariat, il avait donc une base sur laquelle commencer son enquête, ayant copié les dossiers qui l'intéressaient. La sonnerie de son cellulaire interrompit le fil de ses pensées. Sans regarder son écran, il attrapa son téléphone pour répondre.
-Oui, allô,dit-il après avoir posé l’appareil contre son oreille.
-Coucou, mon poussin, dit la douce voix de sa mère.
-Salut maman, répondit-il agacé par le surnom que venait d’employer celle-ci.
Il pu entendre sa collègue ricaner, mais il n’y fit pas attention puisqu’il avait l’habitude qu’Amanda se moque de lui chaque fois que sa mère l’appelait.
-Tu vas bien mon p’tit cochonnet ? Demanda cette dernière d’une voix inquiète. Ça fait deux jours que je n’ai pas de tes nouvelles.
Comme il était le petit dernier de sa famille, sa mère avait tendance à le surprotéger. S’il oubliait de l’appeler à tous les jours, elle paniquait. Une fois, il avait complètement oublié de la rappeler pendant trois jours et elle s’était présenté au commissariat, l’appelant «mon p’tit poussin» devant tous ses collègues. Depuis, il s’était juré de l’appeler au moins tous les deux jours. N’empêche que le surnom lui est resté pendant trois longs mois, et encore aujourd’hui, il arrivait parfois que certains collègues lui rappellent ce douloureux souvenir.
-Je vais bien, soupira-t-il contrarié par le comportement surprotecteur de sa mère.
-Tu en es sûr, mon chaton ?
-Maman ! S’il-te-plaît, as-tu fini de nommer tous les animaux de la ferme, bon Dieu ?!
À ce moment, Amanda ne pu s’empêcher d’éclater de rire. Max se retourna et la fusilla du regard le sourcil relevé, il allait se venger de cette affront.
-Oh, j’aurais tellement préféré que tu sois comptable comme ton cousin. Lui au moins ne risque pas sa vie à tous les jours comme toi, dit-elle ignorant la plainte de son fils.
Il soupira à nouveau comprenant que c’était peine perdue puis il lui demanda:
-Tu m’appelais seulement parce que je ne t’ai pas donné de nouvelle ou tu avais quelque chose à me dire?
-Ah oui ! Tu n’oublie pas le brunch de demain mon p’tit canard, hein ?
-Alice, bon sens, as-tu fini avec tous ses noms d'animaux, notre fils à 27 ans, pas 7 ans !
C’était la voix de son père que Max venait d’entendre. Il devait sans doute être près de sa mère. L’intervention le fit sourire. Son père l’avait toujours encouragé à prendre des risques. C’est d’ailleurs grâce à lui qu’il était aujourd’hui policier et non comptable!
-Non, maman, je n’ai pas oublié pour demain! T’inquiète, j’ai pris le temps de demander congé.
-Je suis contente d’entendre ça. Tu sais que je n’aime pas ça, mon p’tit poulet, quand tu oublies de prendre congé pour ce genre d'événement. Tu sais à quel point c’est important pour moi de voir la famille réunie de temps en temps. Vous me manquez tous !
-Je sais maman, coupa-t-il car la conversation commençait à l’ennuyer.
Il faut dire que la dernière réunion familiale datait d’il y a trois jours, pour la fête de son frère aîné. Il trouvait que sa mère exagérait un peu. D’autant que la seule fois où il avait manqué le brunch sacré du samedi matin, c’était parce qu’il était hors de la ville afin de participer à un camp d’entraînement du service de police. Cela datait de 4 ans déjà !
-Bon, maman c’est pas que je ne veux plus te parler, mais j’arrive chez moi et j’ai plein de trucs à faire. On se voit demain et ne t’inquiète pas, je t’appelle avant de partir de chez moi promis.
-Bon, d’accord mon loup! Je t’aime! Fait très attention à toi, on ne sait jamais ce qui peut arriver, surtout avec tous ses enlèvements qu’il y a depuis 1 mois !
Il rassura sa mère encore une fois avant de couper la communication.
-Menteur, il nous reste encore 5 minutes de route à faire mon chaton, rigole Amanda.
-Ta gueule, lui répondit Maximilien en rigolant à son tour.
En sortant de la voiture, il fit signe à sa partenaire de travail. Il remerciait les Forces chaque jour d’avoir la chance de travailler avec une Ohne Magie, une humaine sans magie, aussi talentueuse et impliquée. Sans cette dernière pour couvrir ses arrières, il ne savait pas s’il serait encore en vie.
Il entra dans son petit 3 ½ et déposa ses affaires dans l’entrée avant d’aller jeter un coup d’oeil à son frigo, affamé. Un restant de macaroni chinois trainait au fond, il tendit le bras pour attraper le plat puis le mit au micro-onde. Il se dit que cela devait être encore bon car il l’avait fait il y a même pas deux jours. Ce soir, il n’avait vraiment pas envie de se forcer à cuisiner malgré que faire de la popote était son passe-temps favori. Il alluma sa cafetière, se préparant pour une longue veillée. Il était déterminé à trouver qui kidnappent les Descendants.
Lorsque son repas fut chaud, il déposa le plat sur sa table avec sa tasse à café et tous les dossiers concernant les disparitions. Il regarda ses dossiers avec ennui, se disant qu’il aurait aimé passer sa soirée devant la télévision. S’armant de courage, il se plongea dans sa lecture, tentant de trouver un lien dans cette masse d’information.
***
Gabriel venait de finir son dernier cours de la journée. Épuisé de sa longue journée, il rangea ses notes dans son sac à dos, en saluant de la main les autres étudiants. Il refusa avec un sourire et la promesse de se reprendre la demi-dizaine d’invitations pour une bière ou un café, n’étant plus d’humeur à socialiser. En prenant son temps, il enfila son épais manteau d’hiver et sortit de la salle pour se rendre chez lui, après avoir salué son professeur.
Il marchait plus lentement qu’à son d’habitude. Il était arrivé en retard à son entraînement et avait dû faire les 40 longueurs supplémentaires demandées par l'entraîneur. La prochaine fois, il en sera à 50 et il n’avait vraiment pas envie d’en arriver là.
Chaque pas était pour lui une torture, ses membres n’en pouvant plus après tous les efforts physiques qu’il avait fait aujourd’hui. Il s’engagea solennellement de ne plus «snoozer» le matin. Non seulement ses muscles criaient à l’aide à chaque mouvement, le froid qui régnait sur les rues de Montréal rendaient son court trajet infernal, chaque coup de vent le faisant frissonner. La proximité entre son université et sa maison était à la fois un avantage et une malédiction à ses yeux aujourd’hui, car le seul moyen de transport était ses pieds.
Il atteignit finalement la porte de sa maison. La petite résidence unifamiliale était silencieuse. il enleva son manteau et ses bottes, les déposant à l’endroit prévu à cet effet dans l’entrée. Saisissant son lourd sac à dos, il en sortit les contenants où s’était trouvé son lunch qu’il déposa dans le lave-vaisselle. Sa mère avait, comme toujours, laissé une note sur le frigo lui disant de manger seul car elle allait être au travail. Étant pédiatre à l’hôpital pour enfants de St-Justine, cette dernière passait énormément de temps à son travail. Sa tante avait elle aussi laissé un mot, l’avisant qu’elle avait laissé son plat préféré dans le frigo pour son souper. Il sourit en voyant sa note. Sa tante avait toujours prit soin de lui, un peu comme une deuxième mère. En y repensant, son oncle et sa tante étaient plus ses vrais parents que sa propre mère qui travaillait beaucoup. Il décida de manger son tajine en faisant ses lectures pour ses cours. Heureux de ne pas devoir commander pour une troisième fois cette semaine, il mit le plat dans le micro-ondes. Avec son assiette réchauffée, il s’installa devant son manuel sur son bureau qui se trouvait sa chambre. Il devait terminer la lecture d’une trentaine de pages pour lundi, sans oublier son travail de session à finaliser.
Alors qu’il avalait la dernière bouchée de son tajine, son cellulaire sonna. Il souleva son manuel et fouilla sous les documents qui s’étaient accumulés durant sa lecture, à la recherche de son téléphone. Voyant que c’était son oncle qui appelait, il décrocha sans attendre.
-Salut fils, fit la grosse voix de fumeur d’oncle Édouard.
Gabriel sourit en entendant la voix de l’homme qui était à ses yeux ce qui se rapprochait le plus d’un père. Son oncle et sa tante n’avait jamais eu d’enfant, c’est donc naturellement qu’il avait pris cette place dans leur vie.
-Salut Ed, lui répondit joyeusement Gabriel.
-As-tu vu ce que Shérazade t’as laissée dans le frigo ? Questionna l’homme en toussant à cause de sa consommation de nicotine.
Gabriel avait tenté tous les moyens en sa possession pour mettre fin à cette maudite habitude, pourtant son oncle continuait à fumer son paquet de cigarette quotidien.
-Oui! Il n’en reste plus une miette. Elle m’a épargné un troisième restau cette semaine.
-Bien, je ferais le message à ta tante. Qu’aimerais-tu manger demain à la maison ? On est samedi demain, tu viens toujours bruncher à la maison ?
-Oui, t’inquiète, je ne raterais jamais un bon plat de Shé, tu sais bien. De toute façon, j’ai entraînement tard demain. Pour le brunch… Des gaufres s’il-te-plaît ! Ça doit faire une éternité que ma tante n’en a pas fait! En passant, je dois être là vers quelle heure déjà ?
-Viens à la maison pour midi environ. Pis t’as raison, des gaufres, c’est une bonne idée.
-Super. Je te laisse Ed, j’dois étudier. Embrasse Shé de ma part.
-Pas de problème fiston. À demain.
Gabriel raccrocha puis lança son téléphone sur son lit avant de se replonger dans ses lectures. C’était son truc pour ne pas se faire déconcentrer par l’arrivée continue des textos et de notifications de ses différentes connaissances et amis. Malgré le fait qu’il ait une vie sociale assez active, il ne laissait jamais cette dernière devenir un obstacle pour ses études. Il avait un objectif en tête et il était bien décidé de tout faire en son pouvoir pour l’atteindre.
Chapitre 3.
La sonnerie de son téléphone réveilla en sursaut Maximilien qui s’était endormi sur son bureau dans sa chambre. Les dossiers qui l’avait occupé la nuit dernière étaient éparpillés autour de lui, tout comme son plat de macaroni de la veille avec sa tasse de café. La cafetière vide traînait un peu plus loin, témoin de la longue nuit qu’il venait de passer.
-Allô, dit la voix encore endormie de Max.
-Mon poussin, qu’est-ce que tu fais encore au lit ? Lui dit la voix inquiète d’Alice, sa mère. J’étais morte d'inquiétude, j’attendais ton appel. Tu devrais déjà être parti à cette heure, je croyais que tu t’étais fait kidnapper toi aussi !
-Ben non maman, je suis policier, je ne me ferai jamais kidnapper voyons, répliqua-t-il en levant les yeux vers le ciel avant d’activer l’haut-parleur de son cellulaire.
Maximilien se leva et attrapa son plat sale pour le mettre dans l’évier de la cuisine avant de se diriger vers son bureau pour mettre de l’ordre dans ses papiers. Il avait réussi à dégager quelques pistes qu’il marqua rapidement dans son carnet. Il allait devoir laisser ses notes chez lui, pas question qu’il amène du travail chez ses parents. Il classa ses dossiers dans le compartiment secret de son bureau magique.
-Sinon, dit-elle ignorant l’énervement de Max. Le jolie garçon que tu as rencontré hier matin au café, penses-tu le revoir?
Max se figea ne sachant pas quoi lui répondre. Il avait oublié que le réseau d’espionnage de celle-ci était performant. L’expression «c’est un petit oiseau qui me l’a dit» s'appliquait littéralement à sa mère. Lui et sa fratrie se savaient constamment surveillés par les petits amis de celle-ci. Ce qui était en soit une bonne et une mauvaise chose. Sa mère savait toujours quand il avait besoin d’elle et savait aussi bien des choses qu’il aurait préféré garder cacher.
-Maman! Je l’ai v vgu seulement 5 minutes. Et c’est pas parce que je le trouve mignon que je vais finir mes jours avec lui!
Il secoua la tête exaspérée.
-Et comment t’es au courant? Oh, laisse faire je n’ai rien dit, dit-il en réalisant ce qu’il venait de dire.
-Oh! Mais c’est un simple hasard si mes oiseaux passaient par là, lui répondit Alice avec un ton innocent. Bon allez, tu devrais te dépêcher, je ne voudrais pas que tu arrives en retard! Et j’ai bien hâte que tu me donnes des détails croustillants sur ce bel apollon.
Sur ces mots, elle raccrocha, ne laissant pas la moindre occasion à Max de répliquer.
Maximilien soupira longuement avant de se diriger vers sa garde-robe. Il choisi son jean noir le plus propre, la chemise bleu foncé que sa mère lui avait donné pour son anniversaire et son veston qui venait de sortir de chez le nettoyeur. Il enfila les souliers de cuir que son père lui avait donnés des années plus tôt et qu’il gardait spécialement pour le brunch familial du samedi matin. Il aurait vraiment préféré porter ses confortables Convers mais ses parents appréciaient qu’ils fassent un effort vestimentaire quand ils se retrouvaient tous ensemble. Il finit de se préparer rapidement, enfila son épais manteau d’hiver et sortit en vitesse de son appartement afin d’essayer d’attraper l’autobus qui le menait directement sur la rue de ses parents dans le quartier d’Outremont.
***
Il descendit à son arrêt, après avoir aidé une jeune mère à descendre sa poussette. Malgré le mécanisme des autobus qui permettent de mettre à niveau la marche et le bord du trottoir, parfois les chauffeurs pressés ne s'immobilisent pas assez près du trottoir. Après un dernier salut, il se dirigea vers la porte de maison de ses parents. Il n'eut pas besoin de sonner. À peine il tendit sa main vers le carillon, la porte d’entrée s’ouvrit d’un coup, révélant sa filleule de 11 ans, Annabelle.
-Tonton Maxou!! Je savais que c’était toi.T’es en retard, tu sais, fit cette dernière en sautant dans les bras de son oncle préféré. Et mamie commençait à s'inquiéter, c'est énervant quand elle est stressé oncle Maxou!!
Max sourit en serrant la fillette contre lui. Il devinait que cette dernière avait perçu sa présence derrière la porte avant tous les autres présents dans la maison. Les pouvoirs de sa filleule n’étaient pas encore fixés mais les adultes de la famille commençaient à noter chez elle une capacité de prémonition, voire de perception des auras. Son grand frère, Antoine, semblait avoir une affinité avec les animaux et ou de guérison. Ce n’était pas encore fixé chez lui. Normalement, les pouvoirs des sorciers sont totalement développés lors de la puberté. ll n’était pas rare que ces derniers commencent à se manifester vers le milieu de l’enfance. Vers 6-7 ans, il était déjà possible de voir vers quelle famille de pouvoirs l’enfant allait se diriger. Il était aussi possible de déterminer si l’enfant allait être un Sorcier à part entière ou un Descendant, soit un enfant de sorcier mais sans pouvoir. Maximilien en était un, ce qui lui donnait un statut particulier. Il a eu la possibilité d’intégrer la société humaine dès son jeune âge. Comme beaucoups de ces derniers, il pouvait ainsi participer à l’effort collectif de maintenir le voile de secret sur les pouvoirs de sa famille.
-Mon lapin! Te voilà enfin, s’exclama sa mère en l’apercevant dans l’entrée.
Cette dernière avait les bras chargés de fruits, graines d’oiseaux et fourrage. Max ne put s’empêcher de sourire. Les animaux avec qui sa mère communiquait venaient la voir souvent, afin de quémander de la nourriture ou quelques caresses. Comme sa mère avait la capacité d’échanger avec tous les êtres de l’espèce animale, elle avait naturellement ouvert un refuge pour les animaux. Cela évitait aussi que la maison de ses parents se transforme en zoo, car Alice avait tendance à accueillir tout animal dans le besoin.
-Vient donc aider ta pauvre mère, mon loup! On doit tout mettre dans l'entrepôt pour que je puisse amener ça à la job demain.
Sans se plaindre Maximilien saisit les plus gros sacs pour aider sa mère. L’entrepôt se trouvait dans la cour arrière et on y accédait par la porte patio située dans la salle à manger.
À peine sortis à l’extérieur de la maison, un moineau vient se poser sur l’épaule d’Alice et lui gazouilla à l’oreille. Très attentive aux gazouillis du petit oiseau, elle ne pouvait s’empêcher de commenter ce qu’il lui racontait.
-Oh non! S’exclama-t-elle en posant sa main devant sa bouche. Merci beaucoup pour le renseignement. Je vais appeler les Gagnon le plus vite possible. Tu peux retourner faire tes rondes.
L’oiseau partit.
-C’est affreux! Victor Gagnon, tu sais le père de Sébastien, l’ami de Théodore? Il a été enlevé lui aussi.
-Oh…
-Gustav, mon oiseau, vient de me dire qu'il a vu la famille Gagnon en panique et en pleure au poste de police. Dis-moi que tu vas retrouver celui qui enlève tous les Descendants! La situation empire, Maxou! On a d’ailleurs une réunion avec le Conseil à propos de ce sujet-là cette semaine.
-Oui, maman. Je vais les retrouver. Je fais de mon mieux mais on n’a pas beaucoup d’indices avec lesquels travailler. On dirait que les gens se volatisent...
-Dis-moi que tu ne disparaîtras pas toi non plus!!
Tout à coup, avant qu’il puisse répondre, un lièvre sauvage sortit d’un buisson. Il s’approcha vers eux, attiré par l’odeur de la nourriture que Max et sa mère portaient faisant oublier à Alice toute son inquiétude pour s’occuper du lièvre.
Max profita du répit pour s’éloigner un peu de sa mère. Comme à chaque fois, Max ne put s’empêcher d’admirer le travail que son père avait fait avec la cour de la maison familiale. Ce dernier avait des pouvoirs très liés à la terre et avait une compagnie d’aménagement paysager. Il avait fait du jardin un petit paradis avec différentes espèces de végétaux. Son pouvoir lui avait permis d’instaurer un micro-climat où l’hiver n’avait pas d’influence. D’après ce qu’il avait compris des explications de son père, c’était une question de géothermie. Aussi, sa grande sœur Anastasia avait mis du sien avec sa capacité d’avoir une influence sur le climat. Un hamac avait été installé dans un coin. Le coin repas était installé sur la terrasse à leur gauche sous l’auvent, entouré par des fines herbes et le petit potager. Une fontaine coulait non loin, abreuvant les différents animaux qui vivaient dans les arbres et buissons environnant. Des fleurs de toutes sortes venaient orner les plates-bandes par centaines. Sa mère adorait les couper et les mettre dans des vases à l’intérieur. À leur droite, se trouvait la petite serre et l’entrepôt. En gros, cet espace servait à Alix comme laboratoire pour tester des nouveaux plants ou faire tenter des croisements. Des artefacts faits par son frère Théodore camouflaient toutes ces merveilles des yeux de Ohne Magie, évitant ainsi les questions des voisins curieux.
Une fois les sacs dans l’entrepôt, ils retournèrent dans la maison où le reste de la famille affamée les attendaient. Anastasia et Béatrice, ses grandes soeurs, avaient déjà mis les couverts sur la table de douze places qui occupait la salle à manger. Ça sentait bon les crêpes, le sirop d’érable et le simili bacon. Le fait que leur mère ait une si forte connexion avec les animaux, faisait que leur menu était toujours 100% végétarien.
Alors que Max prenait sa place habituelle à côté de sa filleule Annabelle, sa grande sœur Béatrice remplissait les cruches d’eau avec son pouvoir tout en installant Marguerite, 5 ans, sur son banc. La maternité l’avait vraiment rendue multi-tasking, se commenta-t-il intérieurement, amusé. Damien, l’époux de Béa et pompier, venait de terminer son shift et avait l’air épuisé. Il était aussi un Descendant comme Maximilien et les deux s’entendaient très bien. Ils savaient ce que c’était de ne pas être aussi magique que les autres membres de leur famille. D’ailleurs, son métier de premier répondant lui permettait de contribuer à l’effort de cacher la magie.
Anastasia sortait de la cuisine avec un plat rempli de saucisses au tofu et d’omelettes. Son époux, Richard la suivait avec le café ainsi que leur fils Antoine, qui du haut de ses douze ans prenait très au sérieux sa tâche d’amener la salade de fruits. Avec d’infimes précautions, il déposa le bol sur la table, sans renverser une seule goutte. Les adultes le félicitèrent, et c’est heureux qu’il s’installa à la droite de sa sœur Annabelle. Théodore aida sa femme Rose, extrêmement enceinte, à prendre place en face du policier et s’assit à son tour à son côté.
Les deux parents de Maximilien prirent place aux extrémités de la table. Alix, en tant que patriarche de la famille, prononça quelques remerciements à la Terre Nourricière pour le repas, et tous commencèrent à se servir et manger de bon appétit. Maximilien, quant à lui, pria de pouvoir manger quelque chose avant que sa mère le bombarde de questions concernant un certain rouquin.
Chapitre 4.
Gabriel se réveilla tranquillement, se réjouissant d’avoir enfin pu faire la grasse matinée, Gabriel aimait beaucoup le samedi puisqu’il avait entraînement après l’heure du souper. Il en profitait toujours pour aller bruncher chez son oncle et sa tante. Le soir, il pouvait même en profiter pour sortir avec ses amis puisque le lendemain il n’avait pas de cours ni d’entraînement.
Après s’être étiré de tout son long, son premier réflexe fut de prendre son cellulaire et de s'asseoir dans son lit pour lire ses messages textes. Le premier était de sa mère. Comme d’habitude, elle lui a écrit qu’elle ne sera pas présente à son réveil ni au brunch qu’organisait son oncle, car elle devait rester à l’hôpital. Il n’était pas surpris. À son souvenir, sa mère n’était jamais là. Il continua sa lecture. Les trois derniers messages venaient de ses amis.
Deux de ses collègues de son cours en Pharmacologie pour un travail d’équipe. Il rassura les deux étudiantes en leur envoyant par email la partie du travail qu’il avait complété hier soir. Le dernier venait d’un gars de son équipe de natation. Ce dernier avait commencé à lui faire des avances mais Gabriel n’était pas intéressé et tentait de trouver la bonne manière de refuser ces invitations sans provoquer des problèmes au sein de l’équipe. Gabriel était ouvertement bisexuel et avait un caractère très social. Il parlait avec tout le monde et parfois cela pouvait être confondu avec de la séduction. Il lui était déjà arrivé dans le passé de voir des gars ou des filles comme des amis mais que ceux-ci le voyaient comme un partenaire sexuel plus qu’autre chose. L’inverse aussi était vrai. Il avait fait des avances à des personnes mais celles-ci l’avaient rejeté en nommant leur crainte que Gabriel ne soit pas fidèle. Ce qui le frustrait énormément. Ce n’est pas parce qu’il était bisexuel qu’il était polyamoureux! Il voulait simplement trouver la bonne personne et il se trouvait que cette personne pouvait être soit de sexe féminin ou masculin.
Il n’avait jamais eu honte de son orientation sexuelle ne s’en cachant jamais. Son oncle, sa tante et son meilleur ami Tommy avaient été les premiers au courant. Il n’en avait jamais parlé à sa mère par contre, mais c’est surtout parce qu’elle n’avait jamais le temps de lui parler.
Après quelques minutes sur son Facebook et Instagram, il sauta en bas du lit pour se préparer. Il devait se dépêcher s’il ne voulait pas être en retard chez sa tante. Il lança sa Playlist habituelle pour se préparer le matin composée surtout d’artistes québécois. Il gardait la pop et l’électro pour ses entraînements. Sous la douche, il entonna en même temps que Roxane Bruneau:
« C'est sûr que j'dois être en amour,
J'ai hâte t'arrive pis j'suis stressée
Mon cœur me fait un solo d'tambour
J'ai l'impression qui va m'lâcher »
Après son mini concert, il coupa l’eau et après inspection devant son miroir, il décida de ne pas se raser. Il se sécha rapidement ses cheveux, ne voulant pas se promener avec des pics de glace sur la tête à cause du vent hivernal. Son téléphone toujours à la main, il se dirigea vers sa chambre pour finir de se préparer. Toujours en chantant, il se créma le visage avec le gel hydratant qu’il essayait depuis quelque semaines et qu’il aimait bien, et suivi avec sa crème solaire. Il était déterminé à éviter les rides avant sa mi-trentaine et la radiation solaire était la première cause de vieillissement de la peau. Il appliqua sa lotion pour le corps en analysant le contenu de sa garde-robe. La natation lui asséchait la peau et Dieu savait qu'il avait besoin de bien l’hydrater. Surtout ses mains, qu’il devait laver entre chaque laboratoire et patient. Il ne quittait jamais son tube de crème pour les mains.
Il ouvrit un premier tiroir, attrapant un vieux boxeur qui commençait à se trouer ici et là et qu’il gardait parce qu’il était vraiment confortable. Il prit la première paire de jeans qu’il vit, l’enfilant d’un mouvement fluide puis se tourna vers où étaient rangés ses vêtements plus formels. ll attrapa une belle chemise à carreau bleu marine et blanche que lui avait offert sa tante pour noël pour finaliser son look.
Avant de décider quels souliers mettre, il jeta un coup d’œil à l’extérieur pour vérifier l’état des rues. 5 cm de neige étaient tombés la nuit précédente, mais selon son cellulaire, il faisait -20 avec le facteur vent, il décida de mettre ses grosses bottes hivernales. Le mois de février ne pardonnait pas. Il vérifia une dernière fois ses messages textes, remarqua l’heure et se dépêcha d’attraper son manteau d’hiver, ses gants, son foulard et sa tuque et de sortir pour se rendre chez son oncle et sa tante.
Sa destination se situant à quinze minutes à pied environ, il décida de marcher. Il ferma à clé la porte d'entrée, puis se mit en route, chantonnant au rythme des notes sortant de ses écouteurs.
***
Il faisait froid et les rues étaient glacées. Bien que Gabriel ait perdu pied plus d’une fois, au moins il ne tomba pas sur les fesses, c’était le plus important.
Lorsqu’il arriva devant la vieille façade de l’appartement de son oncle et sa tante, il sortit ses clés de sa poche. C'était le genre d’appartement classique, qui datait des années 1920-1930, que l’on retrouvait beaucoup dans la partie bourgeoise du quartier de Ville-Marie. Avec ses vieilles pierres grises, sa porte en bois et ses fenêtres désuètes qui ne semblaient pas du tout isolées pour les hivers Québécois, il faisait partie du patrimoine montréalais. Il grimpa l’escalier de béton qui avait été récemment rénové, puis il ouvrit la vieille porte jaune en bois. Aussi loin qu’il se souvenait, il avait toujours eu une clé de l’appartement de son oncle et sa tante. Puisqu’il n’y avait jamais personne chez lui, sa mère travaillant tout le temps, Édouard son oncle, lui avait donné une clé. Il se retrouvait souvent là-bas après les cours pour souper et faire ses devoirs. Sa mère venait le chercher tard dans la nuit et le ramenait chez eux alors qu’il était à moitié endormi. Il arrivait que sa mère arrive aux aurores, et que son oncle insiste pour qu’il finisse la nuit chez eux, étant donné que Gabriel avait de l’école le lendemain.
Il dépassant l'entrée de l’appartement, communément appelé portique en bon québécois, qui était tapissée pour protéger le bois franc de la neige fondue et le sel des rues montréalaises. Il enleva ses bottes et les déposa sur le support à chaussures en plastique que l’on retrouvait dans tous les foyers québécois à cette période de l’année pour éviter que la neige sur les bottes fonde sur le plancher. Il accrocha ensuite son manteau à l’endroit prévu, puis se dirigea vers la cuisine ou sa tante Schérazade préparait le brunch. L’appartement sentait bon le bacon et les gaufres.
-Salut mon petit, comment vas-tu? Demanda sa tante qui cuisinait les œufs dans une poêle chaude.
Gabriel admira la technique de sa tante, qui d’un geste souple, tourna la totalité des œufs sans crever un seul jaune.
-Salut ma tante, répondit-il en l’embrassant sur le front. Ça sent vraiment bon, je meurs de faim.
-Fils, tu es à l’heure! S’écria son oncle Édouard en l’écrasant contre lui dans son embrassade.
-Oui, je me suis dit que ce serait un crime de laisser les gaufres de ma tante refroidir, rigola Gab.
-T’es sûr que tu n’es pas malade, taquina son oncle en posant sa main sur le front de ce dernier avant d’ébouriffer énergiquement les cheveux de son neveu. Je ne me souviens plus la dernière fois que tu as été ponctuel!
-Bon, allez les garçons, interrompit Shérazade. À table! Le déjeuner est prêt!
Une fois que tout le monde a pris sa place habituelle, ils se servirent généreusement avant de dévorer le brunch. Alors que Gabriel buvait une longue gorgée de jus d’orange, Shérazade pris la parole:
-Est-ce que ta mère t’a avisé qu’elle ne pourra pas être présente aujourd’hui?
Gabriel hocha la tête en réponse.
-Elle m’a texté ce matin. Je ne l’ai pas vue cette semaine, apparemment l’état d’un de ses patients s’est détérioré. Mais bon, depuis qu’elle a commencé cette étude clinique, elle est de moins en moins disponible, fit-il en avalant une énorme bouchée de gaufre. Je pense que ça fait une semaine qu’elle n’est pas passé à la maison. Elle m’a fait un virement hier pour que je puisse aller faire des courses demain en tout cas.
-Au moins, elle s’assure que tu ne meurs pas de faim, s’exclame ironiquement Édouard. Mais bon, étant donné qu’elle est l’oncologue pédiatre la plus prisée au pays, elle a des méchantes bonnes excuses pour être moins présente.
Gabriel regarda son oncle amusé. Il avait beau être sur le point de finir sa maîtrise et être médecin à son tour, aux yeux de son oncle, il était encore l’enfant de 4 ans qui a vécu avec eux après la séparation de ses parents. Son oncle était d’une certaine manière, le père qu’il n’avait jamais connu, étant donné que son géniteur a disparu dans la nature après le divorce. En y songea bien, il avait l’impression que sa mère ne s’était jamais remise.
-Tu sais monocle, sans les plats délicieux de matante, je ne sais pas comment je pourrai survivre. Et les brunchs que vous faites sont la meilleure partie de ma semaine. Un peu de repos avant de repartir soigner les gens.
Édouard regarda Gabriel et lui sourit, puis les trois poursuivirent leur repas en discutant tranquillement du beau temps.
Gabriel profita du moment, sachant que le reste de la semaine ne sera pas de tout repos et que cet instant ne reviendra pas d’aussitôt. Son seul regret était que sa mère ne soit pas parmi eux, elle aussi.
Chapitre 5.
-Bye oncle Ed, bye tante Shé et merci encore pour le brunch, c’était excellent comme d’habitude, dit Gabriel avant de prendre sa tante dans ses bras une nouvelle fois avant de faire de même avec son oncle. Ce dernier le serra de toutes ses forces et Gabriel fit semblant d’étouffer comme à l’habitude. Une petite habitude entre eux depuis aussi longtemps qu’il se souvenait.
-On était très content de te voir, nous aussi,, lui répondit son oncle de sa grosse voix rauque de fumeur. Tu passes quand tu veux, tu sais que tu es ici chez toi.
-Je sais mononcle, répondit-il, touché malgré lui par les attentions de son oncle.
-À bientôt mon grand, j’étais vraiment contente de te voir, ajouta Schérazade.
Après un dernier câlin à sa tante, Gabriel regarda son téléphone pour la première fois depuis qu’il était arrivé chez son oncle, un exploit de sa part, pour vérifier l’heure. S’il se dépêchait, il allait fort probablement arriver à l’heure pour son entraînement. Il accéléra le pas en direction de la station du métro Berri-UQAM, ayant presque, presque hâte de s’entraîner. Il emprunta une ruelle peu transitée comme raccourci. Il admirait les graffitis sur les murs qui changeaient à chacun de son passage. Il s’arrêta devant un assez impressionnant et il sortit son cellulaire pour immortaliser ce dernier et peut-être l’ajouter sur son fil Instragram.
-Excusez-moi monsieur, fait une voix douce à sa gauche, interrompant le cours de ses pensées.
Gabriel se tourna pour y voir une voiture de marque Toyota grise qui s'était arrêtée à ses côtés, la fenêtre baissée. C’était une belle femme d’environ 35 ans avec de longs cheveux bruns qui se trouvait à l’intérieur de la voiture. Tout de suite, Gabriel ne put s'empêcher de lui faire son sourire le plus charmeur.
-Oui? Avez-vous besoin d’aide? Demanda-t-il sur son ton le plus agréable.
La femme lui adressa un sourire un peu séducteur. Gabriel se mit sur ses gardes, trouvant que cette dernière le dévisageait comme si elle allait le bouffer tout rond. Il s’était rendu compte au cours des ans que sa voix, son ton ou encore son non-verbal avaient tendance à être interprétés comme de la séduction. Il lui est arrivé que certaines personnes, tous genres confondus, lui aient fait des avances non désirées sous prétexte qu’il les aurait séduits en premier. Bien qu’il en fasse usage allègrement quand cela lui convient, parfois l’effet n’était pas voulu. Il craignait que cette interaction entre dans cette catégorie.
-Pourriez-vous m’indiquer par quel chemin me rendre sur la rue Saint-André ?
-Bien sûr! Vous allez voir, c'est super simple. Vous être proche en plus. Continuez encore tout droit jusqu’à René-Lévesque, ensuite tournez à droite sur le boulevard. Puis vous continuez ...
Gabriel n’eut pas le temps de terminer sa phrase qu’une personne qu’il n’avait jamais vu venir le poussa fortement, le faisant tomber face première. Ayant de bons réflexes, il mit ses mains juste à temps pour éviter que son visage ne percute le sol. Un peu assommé par sa chute, il se releva péniblement en essayant de voir qui l’avait poussé. Il eut seulement le temps de voir un grand homme baraqué s’avancer vers lui et qui lui asséna un coup de poing sous le menton. Puis, le noir!
***
Maximilien ferma la portière de la voiture de Théodore en le remerciant une dernière fois pour le lift. Ce dernier avait un client à voir pas très loin d’ici et lui avait proposé de le raccompagner. Max avait accepté, car il avait hâte de retourner à son enquête et pour rassurer sa mère. Tsé, histoire qu’il ne se fasse pas enlever en rentrant chez lui en plein milieu de l’après-midi. En même temps, avec le froid, les rues étaient moins bondées de monde et le soleil se couchait tôt au mois de février...
Il monta les escaliers jusqu’au deuxième étage, débarra la porte donnant sur le balcon partagé et continua sur la dernière volée de marches jusqu’à son appartement situé au troisième. Les longs escaliers étaient parfois pénibles, mais aujourd’hui il s’en fichait un peu. Alors qu’il débarra la porte de son 3 ½, il enleva ses bottes et son manteau mécaniquement, en faisant déjà le plan dans sa soirée. Avant d’oublier, il texta rapidement sa mère pour l’aviser de son arrivée. Il avait l’impression d’être une jeune adolescente qui avait un couvre-feu, mais les temps n’étaient pas sûrs pour les Descendants. Il comprenait un peu mieux ce que ses collègues féminines devaient vivre au quotidien, augmentant son respect envers elles. Devoir être tout le temps sur ses gardes devenait épuisant, voire frustrant. Marcher seul, une fois la nuit tombée, ne devrait pas être aussi effrayant. Au moins, quand son enquête aboutira, il pourra recommencer à vivre normalement. D’autres personnes n’ont jamais cette chance.
Un bruit soudain attira son attention. Sûrement un des animaux de ma mère, songea-t-il, pas plus inquiet que cela. Il s’avança vers le balcon afin de laisser entrer le possible écureuil ou chat ou encore moineau. Il avait pris l’habitude de les nourrir afin de compenser un peu le travail qu’ils avaient à cause de sa mère. Puis, s’avoua-t-il, ils étaient souvent mignons et le laissaient parfois les caresser. Surtout les chats. Qui revenaient sans que même sa mère leur demande.
Un ombre à figure humaine bougea derrière les rideaux. Maximilien se figea et porta sa main vers sa dague enchantée. Et merde, pesta-t-il. Il avait quitté sa maison tellement vite ce matin qu’il ne l’avait pas prise. Un rapide coup d'œil vers sa chambre lui apprit que cette possibilité n’était pas possible. Il avait la certitude d’avoir entrevu des souliers sous sa porte. Il recula d’un pas, portant sa main où se trouve son arme à feu normalement, mais il l’avait déposé dans l'armurerie du commissariat. SHIIIT, ragea-t-il, que faire, que faire… Il recula d’un autre pas le plus silencieusement possible, en cherchant du regard ce qui pourrait lui servir d’arme. Une lampe… Les couteaux de la cuisine sont trop loin… Un mouvement brusque derrière lui le fit se retourner en position de défense. Il était prêt à vendre cher sa peau. S’il arrive à atteindre la porte, il pourra probablement s’en sortir…L’individu devant lui portait un cache-cou et une tuque, on ne voyait donc que ses yeux.
Sans y penser plus longuement, Maximilien fonça sur lui, avec l’idée de le tasser du chemin pour atteindre la porte d’entrée qui était derrière le bandit. L’homme l'esquiva et lui fit un croche-pied faisant trébucher Max. Le policier reprit son équilibre, attrapant le tabouret placé à côté de son entrée. Il avait enfin de quoi se défendre mais le nombre de ses adversaires venait d'augmenter. L’homme du balcon entra dans l’appartement et la porte de sa chambre venait de s’ouvrir d’une volée. L’officier de police lança le tabouret vers l'assaillant le plus proche de lui et s’élança vers la porte une nouvelle fois, dans une tentative désespérée d’échapper à la situation. Il ne savait pas si les suspects étaient armés et il n’avait pas de renfort. Il se doutait que cela devait être les kidnappeurs des Descendants. Mais comment réussissent-ils à avoir accès à autant d'informations?
L’homme qui était sur le balcon sortit un Taser d’une de ses poches et visa Maximilien.Il avait la main sur la poignée quand le choc le fit s’écrouler sur ses genoux et qu’il tomba face première par terre. Un tremblement le traversa, le faisant perdre le contrôle de ses membres.
-Ça y est, injecte-le! cria un des trois.
Max tente de se débattre, sans succès, aucun de ses membres ne répondant. Il sentit l’aiguille pénétrer sa peau, puis plus rien.
Une douleur à l’épaule le réveilla, il sentit quelque chose bouger sous lui et le bruit d’un moteur. Il essaya d’ouvrir ses yeux, mais ils semblaient peser une tonne. Malgré tous ses efforts, il sombra à nouveau dans le noir. Sa dernière pensée fut de craindre la réaction de sa famille face à sa disparition. On ne savait jamais avec les d’Aquila.Il existait la possibilité que Montréal n'ait plus aucun bâtiment debout une fois qu’ils se rendront compte qu’il avait été kidnappé…
Chapitre 6
Maximilien ouvrit difficilement les yeux. Sa vue était encore floue, l’empêchant de voir avec précision où il se trouvait. Il savait au moins une chose. Le sol sur lequel il était couché était dur et froid. Probablement du ciment… Cela lui donnait un léger indice, pas assez pour déterminer le lieu où il se trouvait, mais assez pour réduire des options. Le plus d'informations qu’il récoltait, plus il augmentait ses possibilités de s’en sortir vivant. Il essaya de s’asseoir tranquillement se tenant la tête puisque celle-ci l'élançait affreusement. Mais que lui était-il arrivé ?
Péniblement, il rassembla ses derniers souvenirs. Son grand frère l’avait déposé devant son appartement, il était entré chez lui et s'était fait attaquer par trois hommes, ensuite, plus rien…
-Mmmhghhrtbcgbr, fit une voix à sa droite le faisant sursauter. Ma tête, merde !
La voix à ses côtés lui disait vaguement quelque chose…
La vue du policier revenait peu à peu, lui permettant de distinguer la forme humaine qui se dessinait devant ses yeux. À première vue, la silhouette semblait masculine. Il cligna furieusement des yeux, tentant d’ajuster sa vision. La personne portait un énorme manteau noir avec une tuque de la même couleur sombre. Alors que les traits se précisaient, il remarqua que sur sa joue, une petite entaille avait saigné jusqu’à son menton et avait fini par coaguler. Son visage lui disait quelque chose... De son côté, Max remarqua qu’il n’avait plus son manteau. Ni ses bottes d’ailleurs. Puis, il se rappela les avoir enlevés avant l’assaut. Le bruit de son mouvement fit sursauter Gabriel qui demanda apeuré :
-Qui est-là ? Que me voulez-vous ? Pourquoi est-ce que je ne vois rien ? Merde ! Mais qu’est-ce qui se passe bordel ?
-T’inquiète, commença Maximilien calmement, ta vue va revenir peu à peu, il faut juste que tu clignes des yeux. Pour le reste, je n’en ai aucune idée…
-T’es qui ? Demanda Gabriel qui retrouvait peu à peu la vision.
Il lutta contre l’envie de se frotter vigoureusement les yeux, sachant les dégâts qu’il pourrait causer ce faisant, grâce à sa rotation en ophtalmologie. Après plusieurs clignements de yeux, sa vision s'éclaircit enfin, lui permettant d’étudier son entourage ainsi que le beau jeune homme qui se trouvait à ses côtés. Il le reconnut, l’ayant trouvé à son goût lors de leur première rencontre.
-Attends... Tu es le policier du café! Celui que j’ai dépassé!
-Ouais… Je ne pensais pas que t’allais l’avouer aussi rapidement mais oui, répondit Maximilien en riant intérieurement de la situation.
Il aurait donné beaucoup pour revoir cet homme aux yeux verts étincelants, mais se faire kidnapper pour que ça se produise n’était pas dans ses plans. Son père lui avait toujours dit de faire attention à ce qu’il souhaitait. Ils se fixèrent en silence pendant quelques instants, aucun des deux ne sachant pas trop quoi dire dans ce type de situation.
Gabriel sentit que ses pensées commencèrent à se précipiter comme d’habitude quand il était stressé. Peut-être que l’officier faisait partie des kidnappeurs et qu’il se faisait passer pour un gars normal kidnappé pour lui soutirer des informations. C’est possible! Ça arrivait souvent dans les films et séries qu’il dévorait à ses temps perdus. Allons Gabriel, la réalité et la fiction sont deux choses différentes. Il se força à prendre une grande inspiration afin de calmer ses pensées, tout en comptant à l’envers. L’autre était un policier… Gabriel décida de lui faire confiance pour l’instant, n’ayant pas vraiment d’autres options. Ne supportant pas le silence, il demanda :
-Ça arrive souvent de te faire kidnapper dans la police?
Max le fixa, incrédule, ne sachant pas trop si ce dernier blaguait
-Euh… Non, pas vraiment. Normalement, c’est moi qui arrête les gens qui kidnappent les autres, répliqua-t-il en ne pouvant pas s’empêcher de blaguer à son tour.
Ils se regardèrent, yeux dans les yeux et, sans savoir pourquoi, ils éclatèrent de rire. À chaque fois que leurs regards se croisaient, ils se tordaient de rire, jusqu’à en avoir mal au ventre et perdre leur souffle. Le ridicule de la situation et le stress leur avait fait perdre tout bon sens. Ils finirent par retrouver leur sérieux et le silence retomba entre eux, plus confortable cette fois.
-Hum… Au fait... Je m'appelle Gab, Gabriel… Je… J’ai peur, lui avoua le jeune homme en se débarrassant finalement de son gros manteau.
-Moi aussi… Avoua le policier en se levant pour mieux voir où il se trouvait.
La pièce était petite et totalement blanche. À l’intérieur, se trouvait deux petits lits qui avaient l’air d’être inconfortables, notamment à cause de la minceur apparente du matelas. La seule fenêtre était minuscule et avait des barreaux rapprochés. Il en conclut qu’avec ses larges épaules, il ne pourra jamais sortir par là. Pareil pour Gabriel qu’il avait pris plaisir à détailler. Par professionnalisme, il s’obligea à en tester la solidité, mais peine perdue. L’autre possible issue était une large porte en acier. Son rapide examen lui fit aussi comprendre que malgré sa force et celle du jeune homme combiné, ils n’arriveraient pas à bouger cette porte d’un seul centimètre. Son cellulaire, qu’il trouva avec étonnement dans les poches de son jeans, ne captait aucun signal. Il regarda l’heure qui affichait 21 h 00. Déjà huit heures que lui et l’autre jeune homme avait disparu. Sa mère devrait s’apercevoir de sa disparition d’ici demain soir et contacter la police ou la communauté magique. En espérant que je me sois libéré avant que la terre entière soit au courant! Ce dit le policier avant de continuer son inspection. Près de la mini fenêtre, se trouvait une porte en bois qu’il poussa du bout des doigts. Il découvrit une salle de bain, une petite douche, une toilette, un lavabo et un minuscule miroir. Ils ont oublié le papier de toilette, se dit Max.
-Merde, ils n’ont pas mit de papier toilette, fit Gabriel qui examinait la salle de bain par-dessus l’épaule de Maximilien.
La remarque de l’auburn le fit éclater de rire. Il pensait être le seul à penser ce genre de ce truc dans une situation aussi dramatique. Ils avaient été kidnappés, n’avaient aucune possibilité de s’enfuir dans l’immédiat et n’avaient aucune idée de l’endroit où ils se trouvaient. Mais manquer de papier toilette, là, ça devenait vraiment catastrophique. Le visage de Gabriel, qui le dévisageait comme s’il avait perdu la tête, ne fit qu’amplifier son hilarité. Il se tenait le ventre, ne trouvant plus son souffle.
-Pas de papier… C’est… Affreux… Réussit-il à articuler, de peine et misère à travers ses éclats de rire.
Le jeune étudiant en médecine avait dû saisir ses propos, car il commença à rire à son tour du ridicule de la situation. Après quelques minutes, ils réussirent à respirer de nouveau normalement. Ils devaient éviter de se regarder, sous risque de recommencer à rire sans arrêt.
-Alors, on est bel et bien coincé ici, commenta Gabriel désespéré.
Il venait de vérifier à son tour si son téléphone captait un quelconque signal dans la chambre, sans succès.
-Et oui…
Le silence retomba dans la chambre, les deux hommes perdus dans leurs pensées. Maximilien avait une petite idée du pourquoi il se trouvait ici. La qualité des installations, les caméras dissimulées aux quatre coins de la pièce ainsi que l’haut-parleur lui soufflaient qu’ils étaient peut-être entre les mains de ceux qui enlevaient les Descendants aux quatre coins de la ville. Mais pourquoi? Il avait beau retourner la situation dans tous les sens, il ne voyait pas pourquoi des individus dépensaient autant de ressources pour des personnes, au final, normales. L’histoire de ses ancêtres était parsemée d’individus qui découvraient par hasard les capacités des sorciers et qui essayaient de s’en approprier. Mais c’était une première en ce qui concernait les Descendants. Après tout, même s’ils avaient des parents avec des pouvoirs, ils en étaient dépourvus. Qu’auraient-ils découvert que son propre peuple ignorait?
Les pensées de Gabriel étaient moins sombres. Il s’inquiétait surtout du fait que son oncle et sa tante allaient être morts de préoccupation. Ah, puis il avait sûrement manqué sa pratique à l’heure qu’il était… Merde, sa mère avait dû être prévenue… Non pas qu’elle allait s’en soucier, mais il allait en entendre parler pendant longtemps.
-À quoi penses-tu, demanda-t-il finalement en allant s’asseoir sur l’un des petits lits.
-Que ma mère va me tuer parce que je vais la faire mourir d’inquiètude avec cette histoire, dit le policier en choisissant de ne mentionner qu’une partie de la réalité.
Il ne pouvait pas partager le sujet de ses préoccupations avec son compagnon d’infortune. Non seulement il ne le connaissait pas, il ne pouvait pas être certain que ce dernier ne soit pas un complice des kidnappeurs. D’autant qu’il avait l’air d’un Ohne Magie, un normal humain sans pouvoir.
-Et toi ? À quoi penses-tu ? Continua-t-il en allant s’asseoir sur l’autre lit en face de Gabriel.
-Que j’ai raté mon entraînement de natation alors que les championnats sont proches. Que personne ne va se rendre compte que....
Il fixa le sol un instant. Soudain, il releva la tête de fusilla Maximilien du regard. Ce dernier le regarda perplexe, ne sachant pas pourquoi l’autre jeune homme semblait aussi en colère envers lui...
-Je suis certain que tout ça c’est de ta faute, s’exclama le nageur en se mettant debout d’un saut, le pointant du doigt. C’est toi le policier après tout ! Tu devais être sur une enquête puis les criminels ont dû décider de se venger ! Je ne sais pas encore pourquoi moi aussi j’ai été visé mais je suis à peu près certain que c’est de ta faute.
Gabriel semblait avoir atteint ses limites. L’accumulation de stress, d’inquiétude et de peur s’était transformée en colère qui se déversa sur la seule autre personne présente. Maximilien se braqua à son tour:
-Oh, désolé que le fait que mon travail ait des répercussions sur ta petite vie tranquille. La prochaine fois, je vais essayer d’attraper des meurtriers ou des voleurs en silence!
Leurs visages à deux centimètres de distance, ils se dévisageaient aussi furieux l’un envers l’autre. Au moment exact où Maximilien allait ouvrir la bouche pour continuer, la porte blindée s’ouvrit en fracas. Les deux jeunes hommes se tournèrent en unisson vers celle-ci, se plaçant l’un à côté de l’autre. Instinctivement, Max fit un pas vers l’avant, afin de protéger Gabriel.
-Ah… Vous êtes réveillés, c’est bien, c’est bien.
La femme qui pénétra dans la chambre portait un sarrau blanc, comme ceux des scientifiques. Elle était légèrement plus petite que Gabriel, blonde et portait des lunettes rondes aux montures noires. Encadrée par deux hommes gigantesques et armés, elle s’avança vers les prisonniers.
-Messieurs, j’ai besoin de vous faire des prises de sang. Soyez gentils ou je vais devoir demander à ces gardes de vous immobiliser.
-Des prises de sang !?! Pas question, j’ai horreur des aiguilles, s’exclama Gabriel. Puis vous êtes qui ? Pourquoi faire des examens sur nous ? Pourquoi vous nous avez kidnappés?
À chaque question, le jeune universitaire s’était avancé un peu plus vers la scientifique. Voyant les gardes commencer à lever leur AK-47, Maximilien saisit le bras du plus jeune pour le faire reculer. Ce dernier se dégagea brusquement, faisant des gros yeux à l’autre homme.
-Quoi maintenant ?
Max se contenta de pointer les gardes qui les visaient avec leurs armes d’assaut.
-Oh… Ok, je vais me calmer et collaborer gentiment, fit Gabriel en levant les mains en geste d’apaisement.
-Vous aussi, monsieur d’Aquila, demanda la femme en se tournant vers le policier.
-Oui, je vais collaborer.
-Bien, alors assoyez-vous sur le lit le temps que j’aille chercher le nécessaire.
Le fait que cette dernière sache son nom venait confirmer ses pires craintes. Ils savaient quelle était sa vraie nature.
-Attendez ! Je pense savoir pourquoi vous m’avez enlevé, mais vous n’avez pas besoin de lui, non? demanda l’officier en pointant l’étudiant en médecine.
-Nous avons nos raisons Monsieur d’Aquila, et elles ne vous concernent pas.
Sur ces mots, elle quitta la salle, revenant quelques minutes plus tard avec du matériel médical. Après la procédure, elle les laissa enfermés, tout aussi ignorants du lieu où ils se trouvaient.
Chapitre 7
Camille Gauthier-Morin descendit le long couloir, les échantillons de sang en main. Accompagnée de ses deux gardes armés, elle ne pouvait s’empêcher de sourire. Elle avait enfin en sa possession la dernière pièce du casse-tête. Si ces hypothèses se relevaient justes, le parfait super soldat bio-ingénierié ne serait plus seulement de la science-fiction. Ça allait enfin être la réalité et tout cela grâce à elle ! Leur compagnie allait faire des milliards en fournissant ces futurs soldats à tous les pays du monde. Cela renforcerait aussi sa position en tant que PDG du CIRMT (Centre international de recherche médical et technologique), lui assurant d’avoir une liberté complète dans ses recherches et expériences personnelles. Elle se devait d’être prudente, elle savait qu’un des membres de son conseil d’administration voulait son poste. Le moindre signe de faiblesse pouvait lui faire perdre tout ce qu’elle avait construit jusqu’à maintenant.
Camille était habitué de devoir lutter pour sa place en tant que femme. Surtout dans le milieu scientifique, encore plus dans un contexte corporatif. Si elle a réussi à occuper le poste qu’elle a en ce moment, c’est parce qu’elle a travaillé sans relâche et s’est montrée sans pitié envers ses concurrents.
Alors que la scientifique marchait d’un pas rapide, elle croisa l’un de ses associés qui transportait le repas vers la cellule des prisonniers. Elle lui sourit en l’arrêtant et vérifia que tout était bien en ordre. Les deux plateaux de nourriture étaient bien là, accompagnés de deux berlingots de lait. Elle le laissa partir, assurée que ses prisonniers restent en bonne santé. Elle avait besoin que ses sujets soient en forme pour passer à travers tous les tests qu’elle avait prévu.
En arrivant devant la porte de son laboratoire personnel, Camille suivit les protocoles de stérilisation mécaniquement. Guidée par l’habitude, elle enfila sa combinaison stérile, traversa les différentes portes et put enfin se mettre au travail. Elle plaça méticuleusement le premier des précédents échantillons sous son microscope, se plongeant dans l’analyse des particularités du sang prélevé. Elle n’arrivait pas à comprendre. Elle relut le dossier en entier essayant de trouver des liens en vain. Il était le fruit de diverses enquêtes et recompilation de dossiers médicaux auquel son statut lui a permettait d’avoir accès. Gabriel semblait être un humain normal avec une vie plutôt banale et il ne semblait pas du tout savoir que les sorciers vivent parmi eux. Alors pourquoi son sang avait-il ces molécules éclatantes que seuls les Descendants et les sorciers possédaient ?
Si l’on regardait bien, on pouvait noter quelque chose d’étrange, comme si leur magie laissait des traces. La marque laissée par leur magie était difficile à voir, mais elle était bien là, c’était un minuscule éclat. C'était ce qui faisait la différence entre les mages et les normaux. L’échantillon de Maximilien était aussi particulier, il brillait différemment de ses autres échantillons de Descendants. Peut-être parce que le gène de la magie dans sa famille était plus fort que chez les autres sujets Descendants? Cela méritait une investigation plus approfondie. Selon ses recherches généalogiques, les ancêtres des Aquila ainsi que ceux des Flavius avaient marqué l’histoire des sorciers autant par leurs capacités magiques que par leur leadership. Ils avaient souvent occupé des postes de pouvoir et avaient siégé régulièrement au sein de leur Conseil. Les archives qu’elle avait réussi à acquérir par des moyens plus ou moins légaux, ne la renseignait pas sur la nature exacte de ses pouvoirs. Cela l’a empêché d’ailleurs de déterminer les pouvoirs exacts des membres actuels de cette famille, ses sources de renseignements refusant de lui donner l’information.
Elle déposa une partie de l’échantillon de Maximilien dans la machine afin d’en faire une analyse ADN. Avec un peu de chance, en comparant ces résultats avec ceux des Descendants qu’elle avait kidnappés aux quatre coins du monde, elle allait avoir un début de réponse.
Jusqu’à maintenant, ils avaient réussi à identifier le gène de la magie, il ne leur restait plus qu’à trouver le moyen de le reproduire ou de l’intégrer dans le code génétique des futurs super soldats. Jusqu’à maintenant, les copies du gène qu’elle avait produites devenaient inertes dès qu’elles quittaient leur endroit de croissance. Comme s’il manquait encore une pièce au casse-tête, un autre gène pour stabiliser le premier peut-être? Elle avait la certitude que la réponse se trouvait dans les deux échantillons qu’elle venait de recueillir. Enthousiasmée par l’idée, elle se plongea dans son travail.
Au bout de quelques heures, elle quitta des yeux son écran d’ordinateur frustrée de la lenteur de l’avancement de sa recherche. Elle évalua qu’il lui manquait encore une vingtaine d'échantillons à analyser aujourd’hui. Les Descendants qui le lui avaient fourni se trouvaient encore dans le sous-sol de son laboratoire. Elle nota sur son agenda de trouver un moyen de disposer d’eux sans se faire remarquer.
Chapitre 8.
Gabriel était étendu sur l’un des petits lits en se tenant le bras. Après sa prise de sang, sa tête s'était mise à tourner et une envie de vomir l’avait envahi. Maximilien qui avait vu le visage de Gabriel devenir encore plus blanc qu’il ne l’était déjà, l’avait attrapé par la taille de justesse au moment où il tombait dans les pommes. De peine et misère, n’ayant pas l’aide des techniciens, il l’avait couché dans l’un des petits lits avant d’avoir à son tour sa prise de sang. Il était à présent assis aux côtés du rouquin car il voulait s’assurer que le jeune homme allait bien.
-Ça va aller? demanda l’homme aux cheveux noirs à son compagnon de peine.
-Oui… Dieu que j’ai horreur des aiguilles! Une chance que c’est les infirmiers qui font les prises de sang, sinon je n’aurais jamais étudié médecine! Je tombe dans les pommes à chaque fois que je me fais piquer… La dernière fois aussi… Je devais vérifier si j’étais intolérant au lactose. Ça c’est quatre prises de sang!!
Maximilien ne put s’empêcher de rire devant l’air scandalisé de Gabriel. Il admirait les gens aussi extravertis et leur capacité de s’exprimer. Personnellement, il n’aurait pas osé s’exclamer et réagir aussi fortement préférant garder son calme et ses distances face à ses émotions.
- Non, mais je suis sérieux ! En plus, les deux premières prises de sang, c’est un nouvel infirmier qui les a faites. À la deuxième prise, il avait entré l'aiguille, mais raté ma veine ! Tu te rends compte du bleu que ça m’a fait ? Lui expliqua Gabriel offusqué. Pis t’as vu la couleur de ma peau, s’exclama-t-il. On voyait juste ça!!
Max redoubla d'hilarité face aux expressions qu’affichait Gabriel. Il ne pouvait pas s’empêcher de remarquer à quel point il était mignon lorsqu’il s’emportait ainsi.
-Tu devrais te reposer un peu pour reprendre des forces, dit Maximilien entre deux éclats de rire.
-Non, fit-il en s’assoyant. Toi, tu as des choses à me raconter, monsieur le policier ! Tu as dit à la scientifique diabolique que tu savais pourquoi elle nous avait enlevés. Je veux le savoir. Et ne me ment pas, je sais quand les gens mentent !
La question coupa court la rigolade. Le visage de l’officier s’assombrit et il fixa Gabriel d’un air extrêmement sérieux. Maximilien hésitait. Pouvait-il avouer sa véritable nature à ce dernier ? Les lois de sa communauté étaient claires. Aucun membre extérieur ne pouvait savoir, au risque de mettre en péril la vie des tous les membres de cette dernière. En même temps, s’il se retrouvait ici, c’est parce qu’il devait aussi être un Descendant. Ne voyant pas d’autres explications à sa présence, il mit de l’ordre dans ses idées avant de commencer :
-Gabriel, c’est ça? J’enquête présentement sur la disparition de plusieurs Descendants aux quatre coins de la ville. J’avais des doutes mais maintenant mes pires craintes se voient confirmées. Je pense que des scientifiques font des expériences sur les nôtres pour s’accaparer de notre magie…
-… Magie?!? le coupa le plus jeune. Est-ce que tu me niaises? Je suis sérieux, moi ! Il y a des hommes armés, on est enfermés et tu me sors une histoire à dormir debout ?!!
Silence. Maximilien le regarda sans comprendre avant de continuer.
-Mais...Mais… Je pensais que toi aussi tu étais un Descendant ! À moins que… T’es un sorcier ?
-Je ne sais pas de quoi tu parles, mais je ne suis pas un «sorcier» certain ! De quels nôtres tu parles ? Tu penses qu’ils vont faire des expériences sur nous ?
-Et bien, je sais qu’ils vont en faire sur moi… Pour toi… Je n’ai aucune idée pourquoi tu es là…
Gabriel décontenancé par ce que venait de dire le plus vieux. Il le regarda un instant, scrutant le visage de celui-ci, tentant de trouver un signe, une expression, n’importe quoi qui lui confirmerait que tout cela n’était qu’une blague. Il savait lorsque les gens mentent, c’était une sorte de don chez lui, une intuition plus développée que la moyenne. Ce sixième sens criait que l’officier était totalement sincère mais son côté rationnel ne pouvait l’accepter.
Le rouquin tenta d’analyser les informations que Maximilien venait de lâcher. Sorciers?? Magie ?!?
Non, cela ne pouvait pas être vrai ? Il refusait de croire à ses stupidités. Mais si c'était vrai, qu’est ce que cela signifiait pour lui? Il n’avait rien à voir avec tout ça. C’est bien ma chance, se dit-il, les gars à mon goût sont toujours cinglés. Comment oublier le camerounais de son cours de bio qui l’espionnait sur tous les réseaux sociaux? Il s’appelait … Dallen… Nanga, ouiii. Vraiment cute et musclé aux bons endroits… Mais fou. Fou et contrôlant, quasi parano. Yep, ça tombe toujours sur moi. Il réalisa que Max le fixait depuis un moment, un air inquiet sur le visage. La fatigue avait fait dériver ses pensées. Ça fait quoi? 10h qu’il a été enlevé? Il y a plus important que ses anciennes relations désastreuses, en ce moment, focus Gabriel! Il ouvrit la bouche pour poser la quantité phénoménale de questions qui se bousculaient dans sa tête mais un bruit l’interrompt.
La porte en acier s’ouvrit à nouveau laissant apparaître cette fois-ci un homme en sarrau blanc. Les deux prisonniers ne purent s’empêcher de remarquer l’arme à feu que ce dernier portait à la hanche. L’homme tenait dans ses mains un plateau. Il déposa seulement le plateau par-terre, le poussa un peu puis referma la porte aussitôt.
Gabriel et Maximilien se regardèrent un moment sans comprendre. Le plus vieux se leva et attrapa le plateau afin de l’examiner, s’assurant que tout était O.K. Il revient s’asseoir sur le lit, le déposant sur le matelas auprès de son colocataire.
-ll semblerait qu’on ait le droit de manger, dit Max d’un ton moqueur. Et on a aussi le droit à du papier de toilette, continua-t-il sur le même ton en prenant le rouleau dans ses mains avant d’aller le porter dans la petite salle de bain.
-Au moins… J’espère que c’est bon, lui répondit Gabriel en soulevant la cloche du plateau. QUOI ?! Beurk ! Non, mais… Des croquettes de poulet frites dans l’huile et de la purée de pomme de terre !! Non mais ils sont pas sérieux quand même ! Hurla le nageur. Où sont les légumes ! J’ai un régime super strict à suivre!! Si mon poids monte, je vais scrapper mon temps!!
-Ton temps ?
-Ouiii. Mon temps! fit-il exaspéré en gesticulant les bras dans tous les sens.
En voyant le questionnement sur le visage du Descendant, il reprit plus calmement après avoir pris une grande respiration.
-Je nage en compétition. Et j’ai un championnat qui débute la semaine prochaine. Au moins le lait est écrémé, soupira-t-il découragé en avalant une longue gorgée. Yeah…
-Si tu veux, je peux les prendre tes croquettes,lui dit Max en prenant une dans son plateau pour la manger.
-Non, ça va, j’ai faim. Je vais me sacrifier et en plus on ne sait pas combien de temps on va rester ici…
Gabriel prit alors une croquette pour la manger et la discussion cessa d’elle-même. Les deux jeunes hommes mangèrent en silence. Beurk, se dit Gabriel pour lui-même, ce sont des pommes de terre en poudre… C’est vraiment dégueu ! Juste pour ça, les kidnappeurs méritaient un séjour en prison. Enfin… Ça et le fait qu’ils les retiennent contre leur gré.
Après avoir terminé leur assiette, les deux jeunes hommes déposent leur plateau par terre. Gabriel de son côté se coucha sur son lit après avoir attrapé son téléphone dans son manteau d’hiver qui traînait sur le sol. Max fit de même sur l’autre lit.
-Fais chier, dit Gabriel en regardant l’heure sur son téléphone. On fait quoi maintenant ? Il est 22h, je ne suis pas fatigué et je n’ai pas de réseau. On peut même pas aller sur Facebook ou Instagram ou même sur Tik Tok ! Je fais comment pour me trouver une fille sans Tinder moi ? Je fais comment pour répondre au gars avec qui je m’entraine que notre Netflix and Chill est annulé, hein ?
-Facebook, instagram, ricana le policier. Tu voudrais mettre quoi là-dessus hein ? #kidnappee ? Puis tu trouves pas que Netflix and Chill, c’est tellement 2016 !?! Ils allaient clairement nous laisser avec la possibilité de communiquer avec l’extérieur, fini-t-il sur un ton sarcastique.
-Ben, moi au moins, j’ai une vie sociale plus palpitante que la tienne, lui répondit Gab sur un ton arrogant.
-Ça, c’est ce que tu crois, fut la réponse de Max avec un petit clin d'œil à son intention.
Gabriel le regarda un moment avant de s’asseoir et de regarder Max tout à coup très intéressé.
-Ah ouais ?
-Ben quoi ? C’est pas parce que je suis policier que je dois vivre comme un moine. D’ailleurs, je me suis toujours dis que je ne sortirais jamais avec un autre policier.
-Policière, tu veux dire…
-Non, non, tu as bien entendu, j’ai bien dis avec un policier, lui répondit Max sûr de lui.
-Oh… Hum… Je ne pouvais pas savoir…. Tu n’as pas l’air… Enfin, je ne savais pas que tu étais gai...
-T’inquiète, mais parlons plutôt de toi, dit Max en souriant de toutes ses dents. Comme ça, tu fais du netflix and chill avec des garçons et tu dragues des filles sur Tinder ? C’est pas mal intéressant, je trouve, continua le policier avec un clin d'œil à l’intention du nageur. Surtout que toi non plus, tu n’en pas l’air… Ou plutôt tu es assez beau pour plaire à tous… Il faut dire que je ne suis pas impartial, parce que tu es pas mal de mon goût, conclut Maximilien en dévorant l’athlète du regard.
Pour une des rares fois de sa vie, Gabriel ne trouva pas les mots pour répliquer. L’atmosphère changea entre les deux. Il n’était pas certain… Il rit intérieurement de lui-même. ‘’Incurable. je me fais kidnapper et la seule chose à laquelle je pense c’est à ces yeux bleus…’’ L’officier venait-il vraiment de lui faire des avances? Il connaissait une seule manière de s’en assurer. Il rassembla son courage et se leva, sans quitter Maximilien des yeux. Il prit son temps pour traverser le court espace qui sépare les deux matelas. Il s’assit très près du policier qui le dévorait du regard. Lentement, pour apprécier le doux frisson qui courut le long de son dos, il déposa sa main sur la cuisse musclée de l’agent. Un sourire séducteur sur les lèvres, et voyant que sa proie était sous son emprise, il rapprocha ses lèvres de l’oreille de ce dernier.
-Tu crois qu’ils ont installé des caméras dans les toilettes?
Chapitre 9
-C’est vraiment dommage pour la salle de bain, rigola Gabriel en regardant le policier assis à ses côtés sur le petit lit.
Max regarda le plus jeune en affichant un sourire amusé. Le policier avait freiné les ardeurs de son compagnon en lui annonçant qu’il avait vu des caméras dans la petite salle de bain. Malgré tout, le plus jeune des deux n’avait pas pu s’empêcher d’aller vérifier par lui-même et était revenu s’asseoir aux côtés du plus vieux déçu.
-Alors, on fait quoi de la soirée ? Il est 23h, commença le nageur. Je ne suis pas fatigué et en plus je crève de chaud, continua-t-il en détachant les trois premiers boutons de sa chemise.
Max n’a pas pu s'empêcher de suivre du regard les gestes du nageur. Maintenant, c’était à son tour d’avoir chaud. Gabriel avait une façon sexy de détacher son vêtement, laissant entrevoir sa peau blanche, parsemée de taches de rousseur et ses petits poils roux. Maximilien ne pouvait vraiment pas le nier, la gestuelle de Gabriel allumait ses sens.
-Et si on apprenait à se connaître, proposa finalement Gabriel en souriant à Max.
-Hein ? Parce que tu t’intéresses à autre chose que toi dans la vie ? L'interrogea le policier.
Le plus jeune roula des yeux avant d’éclater de rire.
-Bah, en fait, on a pas trop le choix. On est pris tous les deux ensemble pour je ne sais combien de temps, répondit-il en hochant les épaules. Alors, ça pourrait faire passer le temps.
-C’est bien ce que je me disais…
-Roooh, bon aller, on fonctionne comment ? On fait ça sous forme de jeu ?
-On fait comme tu veux. De toute façon, tu es le seul à trouver ça amusant....
-D’accord, alors, je te pose 10 questions et tu fais de même en retour, c’est bon?
-Oui, oui...fit Maximilien amusé et légèrement inquiet.
Il ne savait pas trop à quel genre de question s’attendre. Il devait simplement éviter de mentionner sa famille, disons… Particulière? Ok, ce terme était bien en dessous de la réalité.
-Première question, continua Gabriel, inconscient des craintes de Maximilien. Tu es de quelle origine?
Le policier regarda le plus jeune, hésitant. Gabriel n’avait pas tort. Il n’avait rien à faire alors, pourquoi ne pas apprendre à un peu se connaître pour détendre l’atmosphère? Même s’il trouvait l’idée du jeu ridicule, Maximilien se résigna et lui répondit:
-Je suis d’origine Latine/Italienne, soupira-t-il. Bon à moi maintenant, hum… Il réfléchit un moment. Quel est ton film préféré ?
-T’es sérieux là ? Tu peux me poser toutes les questions du monde et la seule chose qui te vient en tête, c’est de me demander quel est mon film préféré ?
-Euh…
Le plus vieux haussa les épaules ne sachant pas quoi lui répondre. Il est vrai que Maximilien avait d'autres questions en tête. Par exemple, comment vivait-t-il sa bisexualité, comment l'avait-il appris et pourquoi était-il aussi chiant. Mais pour le moment, il préférait poser une question banale.
-Écoute, c’est ton idée, ok? Si tu veux, on peut arrêter cela maintenant. Ou tu peux répondre à ma simple question, conclut Maximilien incertain de laquelle des options lui plairait le plus. Il souhaitait en savoir plus sur le jeune nageur qui l’attirait mais en même temps, il n’était pas sûr de la sagesse de répondre à ces questions.
-Bon, bon, ne t’énerve pas. C'est Braveheart avec Mel Gibson, mon film préféré. J'ai des frissons à chaque fois que Mel hurle «freedom» à la fin du film. Je connais les répliques par coeur aussi!
Maximilien ne put s’empêcher de sourire. La façon de Gabriel, son expression en décrivant ce qu’il aimait était à son avis extrêmement mignonne. Non, qu’il le lui dirait…
-Deuxième question maintenant, enchaîna Gabriel, pourquoi as-tu décidé de devenir policier ?
-Hum… En fait, au début c’était surtout pour provoquer ma mère, elle voulait tellement que je devienne comptable comme mon cousin! Mais, j’avais envie de plus. Je ne me voyais pas passer ma vie à vérifier des chiffres! Et ensuite, c’est mon père qui m’a poussé vers l’école de police. Il savait que j’avais envie de faire quelque chose d'intéressant de ma vie, d’aider les gens, de vivre dans l’action quoi !
Gabriel écouta attentivement le plus vieux, il sentait que ce que lui disait le policier était important pour lui.
-Mon père a toujours été là pour moi. Ma mère aussi, mais d’une façon différente je dirais…
-D’une façon différente? Voulu savoir le nageur.
-Eh, non. Bel essai, mais c’est à mon tour de poser une question. Hum…
Il réfléchit un moment, mais la question s'imposa d’elle-même.
-Tu as quel genre de relation avec ta famille ? Genre tes frères, tes soeurs, tes parents, tes oncles, tante et bla bla bla.
-Je suis enfant unique… Ma mère est toujours à l'hôpital, je veux dire, précisa-t-il en voyant l’expression de Max, que ma mère est médecin à Sainte-Justine. Tu sais, l'hôpital pour enfants? J’ai souvent l’impression que ces enfants sont plus importants pour elle que moi… Mon père… Je ne sais pas qui c’est. Ma mère ne me l’a jamais dit et il n’a jamais fait partie de notre vie. C’est mon oncle et ma tante qui m’ont élevé…. En tout cas… J’ai toujours eu l’impression que c'étaient eux, mes vrais parents. Mais au moins, je suis entouré d’amis, sourit Gabriel. Il prit une pause et soupira. C’est vraiment dommage que l’on soit pris ici. En ce moment, je serais en train de baiser avec un super beau nageur !
-Et une relation sérieuse, ça ne t’intéresse pas, demanda le policier.
-Hey, hey monsieur le curieux, c’est mon tour de poser une question.
Max roula des yeux. Il ne voulait pas s’avouer qu’il trouvait ce jeu intéressant finalement.
-Donc, voilà, raconte-moi tout de ton monde. Je veux dire, des sorciers, c’est complètement fou!! Cependant, je te crois. J’ai toujours su lorsque les gens me mentent et toi tu ne me mens pas, j’en suis certain. Explique-moi, j’ai besoin de comprendre pourquoi on est enfermés ici, toi et moi !
-Tu sais, même si je te raconte tout, quand ma famille va nous retrouver, ils feront en sorte de l’effacer de ta mémoire.
-Je m’en fous! J’ai besoin de savoir, sinon, le temps que je vais passer ici, ça va me rendre fou!
Max pouvait compatir. Lui aussi ne pouvait rester indifférent face à une énigme.
-C’est bon, j’ai compris. Installe-toi confortablement, c’est une longue histoire. Laisse-moi commencer par une légende que l’on raconte à tous ceux qui naissent au sein d’une famille de sorciers.
Il était une fois...
Au temps où les chevaliers combattaient les uns contre les autres et où les châteaux ressemblaient à des forteresses, les sorciers se mêlaient aux humains sans jamais dévoiler leur véritable nature…